Chaque édition des Jeux Olympiques est l’occasion de voir figurer au programme officiel des compétitions de nouvelles disciplines sportives. Il y a 100 ans aux Jeux de l’après-guerre d’Anvers 1920 certaines disciplines marquent les esprits que ce soit pour leur nouveauté, leur programmation, leur dernière apparition ou simplement par certains athlètes qui font parler d’eux sur le moment et pour la postérité.
Découvrez ici quelques histoires inspirantes de 1920 à travers les archives du patrimoine olympique !
Le hockey sur glace pour la première et la dernière fois aux Jeux Olympiques d’été.
Les Jeux Olympiques d’Anvers ont lieu du 20 août au 12 septembre 1920 mais en réalité ils commencent bien plus tôt, en avril 1920, par des compétitions de patinage artistique et de hockey sur glace. Les Jeux d’Anvers sont donc les seuls Jeux d’été de l’histoire à avoir accueilli les hockeyeurs, leurs crosses et leur palet. Les Jeux d’hiver n’existent pas encore et verront le jour qu’en 1924 !
Sur les sept équipes en lice, celle du Canada, les Falcons de Winnipeg, remporte le tournoi haut la main grâce à ses trois victoires contre la Tchécoslovaquie, les Etats-Unis et la Suède. Quant à l’équipe suisse, elle retourne bredouille au pays. Les joueurs suisses, malgré leur grande expérience, se présentent vêtus de fringants shorts blancs avec très peu de protection. Le gardien de but se pare aussi de sa plus belle cravate lors des épreuves !
Ces nouvelles épreuves ont lieu dans la patinoire du Palais de Glace d’Anvers. Très petite mais très élégante, elle offre la possibilité aux spectateurs de pouvoir s’asseoir à des tables et de regarder les parties tout en dégustant un verre de vin et en écoutant de la musique jouée par un orchestre !
L’équipe du Canada (CAN), 1ère du tournoi avec Wally Byron en tant que gardien de but, Robert Benson, Konrad Johannesson et Allan Woodman en tant que défenseurs et Frank Fredrickson, Chris Fridfinnson, Magnus Goodman et Haldor Halderson. © CIO
L’équipe de Suisse (SUI) de hockey sur glace avec de gauche à droite DeSiebenthaler, Bruno Leuzinger, Max Sillig, René Savoie, Louis Dufour fils, Marius Jaccard, Cuindat, Max Holzboer et Paul Lob. © CIO
Médaille commémorative de participant aux JO d’Anvers 1920 ayant appartenu à René Savoie (SUI). © CIO
Duke, le champion de natation et le père du surf il y a 100 ans
Le nageur Duke Paoa Kahanamoku (USA), originaire d’Hawaï, fait sa première apparition olympique en 1912 et égale le record du monde au 100 m nage libre.
Maillot de bain gris de Duke Paoa Kahanamoku (USA), avec deux boutons de fermeture sur les épaules. Archives du Comité International Olympique. © CIO
A Anvers 1920, le « Duke » comme il est communément appelé, conserve son titre sur 100 m nage libre et ajoute une troisième médaille d’or à sa carrière dans le relais 4×200 m nage libre. En 1920, Duke représente également les États-Unis au water-polo.
Kahanamoku revient aux Jeux Olympiques en 1924 et termine deuxième derrière Johnny Weissmuller (USA), le célèbre Tarzan, au 100 m nage libre. Le frère de Duke, Sam, se classe troisième dans la même course.
Entre ses participations aux Jeux Olympiques, Duke Kahanamoku, également passionné de surf, parcoure le monde pour présenter et promouvoir ce sport. C’est ainsi que cet homme aux nombreux surnoms est également appelé le “père du surf”. Plus tard, Kahanamoku joue des rôles secondaires dans 28 films hollywoodiens.
Aujourd’hui, 100 ans après, le surf, discipline inventée dans les îles du Pacifique, va devenir pour la première fois une discipline olympique aux Jeux de Tokyo 2020. Les surfeurs de la planète sont attendus sur la plage de Tsurigasaki qui accueillera les épreuves de surf aux Jeux de la XXXII Olympiade à Tokyo. Plus d’un siècle après, le rêve de Duke de voir apparaître le surf aux JO se réalise !
Duke Kahanamoku (1890 – 1968) (USA), nageur et surfeur hawaïen avec Charlotte Boyle (USA), à droite, et Ethelda Bleibtrey (USA) sur une plage de Waikiki en 1925. © Hulton Archive/Getty Images
Ethelda Bleibtrey (USA), une championne de natation qui fait bouger les conventions vestimentaires de l’époque
En 1920 à Anvers, en plus de 100 m nage libre et du relais 4x 100 m, une nouvelle épreuve fait son entrée au programme : le 300 m nage libre. L’Américaine, Ethelda Bleibtrey, âgée de 18 ans, s’impose dans les trois épreuves avec à la clé le record du monde pour chacune des distances !
Son histoire a pourtant une portée plus grande. Elle commence à nager à 15 ans pour soigner sa poliomyélite. Ethelda Bleibtrey participe à l’émancipation de la femme : en 1919 elle décide de nager sur une plage de Californie sans les bas imposés aux femmes américaines de l’époque d’Après-Guerre. Elle est arrêtée et l’opinion public se révolte : les femmes pourront enfin nager sans devoir se couvrir les jambes !
Maillot de bain ayant appartenu à une nageuse américaine, datant des années 1910. Les premiers vêtements de bain sont extrêmement lourds, mais à partir des années 1910 les costumes allant du cou aux genoux laissent les bras et les jambes exposés. Les tricots machine de laine ou de coton étaient plus légers à porter et le terme « maillot de bain » est introduit dès 1913. Archives du Comité International Olympique. © CIO
Maillot de bain pour femme, dès années 1920. Après la Première Guerre mondiale, le maillot de bain se transforme dans un vêtement de sport à la mode qui symbolise la modernité. Des motifs géométriques Art Déco remplacent les épais tricots en laine noire, bleue navy ou marron. Archives du Comité International Olympique. © CIO
A Anvers, les nageuses portent en grand partie des maillots de bain couvrants, de couleurs foncées et principalement en laine. Elles sont encore vivement encouragées à porter des peignoirs. Les maillots de bain en coton fournis par la fédération américaine, quant à eux, couvrent les avant-bras et les jambes jusqu’à genoux. C’est pourquoi les nageuses américaines ont préféré prendre leur propre équipement en insistant sur le fait que ces maillots officiels compromettaient grandement leurs performances sportives. Ethelda Bleibtrey porte un maillot de bain dont la texture semble être différente d’un maillot en laine.
Ethelda Bleibtrey (USA), championne olympique du 100 m, 300 m et 4 x 100 m nage libre. Le maillot d’Ethelda se distingue par une fibre plus brillante et synthétique. © CIO
Par la suite, Bleibtrey consacre une grande partie de sa vie à enseigner la natation à des enfants handicapés et devient infirmière en 1959 au service des personnes âgées et atteintes d’handicaps.
Le tir à la corde (Tug of War) pour la dernière fois aux Jeux
De 1900 à Paris jusqu’à 1920, à Anvers, des compétitions de tir à la corde, inspirées des épreuves antiques, sont inscrites au programme olympique.
Les règles sont simples : deux équipes de huit athlètes tiennent les deux bouts d’une longue corde. Deux lignes sont tracées, espacées de quatre ou cinq mètres. Le but est de faire avancer en force l’équipe rivale au-delà de la ligne, ou de la faire tomber. Les duels durent tout aux plus cinq minutes. Si aucune équipe ne franchit la ligne, l’équipe qui attire l’autre le plus proche de la ligne est déclarée gagnante. Les rencontres se déroulent en deux manches.
A Anvers 1920, la grande équipe gagnante est l’équipe britannique, composée de membres de la police londonienne et qui remporte facilement face aux quatre autres équipes en lice.
L’équipe de Grande-Bretagne (GBR) du tir à la corde, 1ère, composée de policiers, lors d’un match. © CIO
Après les Jeux de 1920, le CIO a estimé que le nombre de compétitions aux Jeux est trop élevé et le tir à la corde est retiré du programme olympique, ainsi que 33 autres épreuves. Elles sont réduites de 156 à 126 pour Paris 1924.
Une estrade numérotée pour les remises de médailles
Aux Jeux Olympiques, jusqu’en 1928, les trois premiers d’une compétition reçoivent leurs récompenses de différentes manières. Lors des premiers Jeux Olympiques à Athènes en 1896, Georges 1er, roi de Grèce, leur remet respectivement une médaille, un rameau d’olivier et un diplôme lors de la cérémonie de clôture. D’une manière générale, les cérémonies « groupées » de remises des médailles voient les athlètes se situer dans une position plus basse que les dignitaires et officiels qui les récompensent.
Les premiers podiums officiels, tels qu’ils apparaissent encore de nos jours, font leur apparition aux JO de Los Angeles 1932 et les athlètes sont placés sur trois piédestaux numérotés de 1 à 3, celui du centre plus haut que les deux autres, le vainqueur de la première place au centre, le deuxième à sa droite et le troisième à sa gauche.
A Anvers en 1920, on voit pourtant déjà apparaître des estrades numérotées et arborant les chiffres dans l’ordre actuel. Les dignitaires qui récompensent les athlètes, quant à eux, se trouvent toujours sur une estrade en hauteur.
Aileen Riggin (USA), médaillée d’or au plongeon, récompensée sur la place no 1 de l’estrade avec la statuette de « L’athlète victorieux ». © CIO
Lors des JO à Anvers en 1920, le CIO remet les coupes et challenges correspondant aux compétitions, lesquelles sont offertes manière symbolique depuis 1906. Par la suite, elles sont complètement retirées et conservées au Musée Olympique de Lausanne. Aux yeux du comité d’organisation d’Anvers, une médaille ne semble toutefois pas suffire. Les médaillés d’or reçoivent donc en plus une petite statuette, œuvre du sculpteur Léandre Grandmoulin, intitulée ‘L’athlète victorieux’, et représentant un athlète brandissant une couronne de laurier de sa main droite.
Statuette en bronze dorée « L’athlète victorieux » offerte aux médaillés d’or et réalisée par Léandre Grandmoulin, 1920. © CIO
De Anvers 1920 à Tokyo 2020 : continuer à croire en ses rêves
Ainsi les Jeux d’Anvers nous offrent de belles histoires sportives. Plus de 2600 athlètes (dont plus de 60 femmes) ont participé aux Jeux, représentant 29 pays. Anvers, qui a eu très peu de temps pour nettoyer la ville des décombres laissés par la guerre et pour construire de nouvelles installations, a réussi le pari d’accueillir 156 épreuves sportives des 22 sports au programme.
L’année 1920 rappelle aussi en quelque sorte notre actualité. Aujourd’hui, la pandémie de COVID-19 a obligé à reporter les Jeux de Tokyo 2020 en 2021. Les similitudes entre ces deux périodes ont donc conduit l’équipe du Musée à fouiller dans les archives et mettre en exergue des histoires de sportifs qui ont toujours continué à croire au rêve olympique !